Overblog
Editer la page Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
/ / /

En ce mois de mai 70, nous sommes tous ravis de partir jouer au festival d’Egletons, petite ville de Corrèze où des étudiants en BTP font des travaux pratiques grandeur nature dans les rues…

Mlle Lehot vient de quitter ses fonctions et c’est Mlle Boulay qui sera la « patronne » de l’expédition !

Je fais partie de la belle équipe qui sous la conduite de Michel Favory, pas encore sociétaire du « Français », présente « Les Sept contre Thèbes ».

Nous sommes jeunes et insouciants, voire très irrespectueux…

Pendant le pot de bienvenue nous nous emparons de bouteilles de roteuse et faisons pêter les bouchons pendant le discours d’un tout jeune député d’un mètre nonante cinq,  qui nous rejoint peu de temps après, pas rancunier, clope au bec.

« Notre » tragédie grecque est programmée à la salle des fêtes, vaisseau échoué là dans les années d’après-guerre , aux caractéristiques techniques effarantes.

Tout en assurant une partie musicale, aux percussions (enfant du rock et de Vilar…) je suis aussi chargé de la mise en place du décor avec la décoratrice ( je ne sais plus son nom, mais son décor et ses costumes étaient très beaux et parfaitement adaptés)

Gros problème, la rampe fait 40 cm de haut !

Antigone et Ismène ont de nombreuses scènes couchées ou à genoux… autant dire qu’on ne les verrait jamais…la merveilleuse Hélène Darche est toute petite et la belle Frédérique Tirmont à peine plus grande…

Avec Morgé nous contemplons ce mur un rien dépités, mon regard traîne sur le plateau et là je vois des caisses en plastique de Coca Cola, comment les idées viennent ?

J’en attrape une, la cale devant la rampe, il reste 4-5 cm, Morgé m’interroge du regard…

« Vois, Gerard, ce qui reste c’est l’épaisseur d’un plancher…

  - J’te vois venir…

  - doivent bien avoir une piste de danse par ici ! »,

Je branche le gardien de la salle.

Il y a un plancher à la mairie, j’y fonce pendant que Morgé et la petite déco vont chez le distributeur de boissons, voir s’il y a moyen d’avoir 60 caisses !

À la mairie on me dit qu’il n’y a pas de problème pour avoir le plancher, faut juste aller le chercher…une moitié dans une ferme à Chapelle-Spinasse, l’autre à la salle paroissiale de Moustier Ventadour…

La dame de la mairie précise que c’est des panneaux de 1,50m sur 4m.

Je reviens rapidos à la salle des fêtes (j’ai emprunté le demi-course du gardien) où les machinos sont déjà en train de décharger les caisses rouges et jaunes.

« Faudrait le camion des décors » dis-je à Morgé, «  ou est ce que je trouve le chauffeur ?

- Ben à cette heure, doivent se mettre à table au restaurant …y a un repas avec les notables.

- tant pis, il faut ce plancher ! »

Je fonce au resto…

J'’arrive en pleines ripailles…

«  Euhhh, bonjour, Mlle Boulay, j’aurais besoin du camion pour ramener du matos, c’est possible ? »

Notre dame patronnesse se raidit, plus droite que jamais, s'essuie la bouche, pose sa serviette sentencieusement, me fusille du regard et me jette, méprisante et hautaine : » tu ne vois pas qu’on mange ! »

j’écarquille les yeux et lance à la cantonade!

«  Ben désolé, moi, je suis venu pour faire du théâtre ! » et je me tire fissa en claquant la porte, un peu étonné par ma répartie…

Dans la rue, marchant pas très vite, je suis rejoint par le chauffeur du camion, qui me tape sur l’épaule « Hé môme, on y va, chercher tes bouts de bois ! tu me plais toi …et pi, je commençais à me faire chier sérieux, avec les vieux, là-haut ! »

Les planchers rapatriés se placeront à merveille sur les caisses, juste un clou par ci- par là pour que ça ne bouge pas…

Le père Chassaigne, roi incontournable des machinos, passant par là (occupé dans une autre salle) nous affichera un désaccord formel «  c’est pas comme ça qu’on fait ! »

Je l’envoie balader de façon peu amène : « c’est celui qui fait qui a raison »

Morgé se marre.

La "déco" a recouvert tout le décor de « flokatis », fourrure en laine ou viennent se calfeutrer les comédiens avant de répeter.

Tout est prêt quand Michel Favory arrive, il jette un œil acéré et tranquille sur l’installation…

« C’est bien. » dit-il  «  allez, on répète »

 

Revenu Rue Blanche, je serai convoqué dans le bureau du tout nouveau proviseur de la nouvelle ENSATT, Mr Roudy, en présence de Mlle Boulay et Mr Chassaigne venus se plaindre de mon intolérable insolence…

Resté avec le « patron » pour ce que je pensais être un « savon »… nous avons bien ri.

« Ne le répétez pas, James » me glissera Pierre Roudy en sortant de son bureau…

 

Et il y a bien d’autres aventures, encore, à conter sur Egletons…

Partager cette page
Repost0

Présentation

  • : Le blog de Claude Quemy
  • : ENSATT / RUE BLANCHE, les 70 ans, un livre et aussi : Tout et son contraire: coups de gueule, etats d'âme, pensées pleines et creuses, gratouillis et tout ce qui vient et que personne ne lira ou presque.
  • Contact

Recherche