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jukebox1

 

 

Conférence prononcée par le professeur Ladislas de Kalenbourg, à l’occasion de la présentation du dernier exemplaire existant de la celebre invention du Duc Boc de Wurlizer.

 

Je tiens tout d’abord à vous remercier pour votre participation nombreuse et distinguée à cette rencontre solennelle, en hommage à cet esprit éclairé, à cet innovateur, à ce grand humaniste que fut le DUC BOC DE WURLIZER.

 

Qui était le Duc Boc de Wurlizer.

 

LE DUC WOLFLGANG AMADEUS BOC DE WURLIZER vivait à la cour, à la fin du règne du roi Louis XIV. Il était titulaire de la charge de Grand intendant des petits et moyens plaisirs du Roi.

 

Cette haute responsabilité n’était pas le fruit d’un hasard : en effet, la famille BOC DE WURLIZER s’était illustrée des son immigration des Flandres au XVIème siècle par son intérêt pour les arts :

 

son grand oncle Leomardo était peintre,

son cousin Jean-Sébastien tambour major au régiment des Flandres,

le grand-père Nicolas était taxidermiste

et sa grand mère faisait du vélo à quatre pattes sur un tonneau.

 

Mais revenons à Wolfgang.

 

Le Roi aimait la musique et particulièrement les chanteuses et leur répertoire si délicieusement baroque, la finesse de leur trilles, la virtuosité de leurs arias, la rondeur de leurs couplets, la dextérité de leurs récitatifs, l’étendue de leur tessiture, l’élévation de leur contre ut.

.

Afin de satisfaire les désirs du souverain, avec la souplesse et la rapidité nécessaire, le duc (adepte du flux tendu), eu l’idée de faire chercher les chanteuses à leur domicile en chaises à porteur.

 

Ainsi pouvaient-elles égayer les longues soirées du monarque par les prouesses harmonieuses de leur organe à la suavité profonde.

 

Comment cela se passait-il ?

La chaise à porteur était déposée devant le roi et, sans même sortir de l’habitacle exigu mais néanmoins coquet, les divas entonnaient les airs de cour à la mode pour le plus grand plaisir du souverain subjugué par leurs talents.

 

A ce propos je ne résiste pas au plaisir de vous conter une anecdote :

 

Les chanteuses logeant parfois assez loin du palais de Versailles et de plus, certaines d’entre elles excédant le poids total en charge autorisé par la convention collective des marcheurs porteurs.

 

il fallait que ceux-ci se relayent, ils étaient donc en général au nombre de 3 (deux qui la portent, un… qui se repose, par roulement).

 

On a retrouvé les registres du duc que l’on peut consulter à la B.N. (fond Arnaque et Charlatan, boite 183 6G2 K13, cotte 99924, page118)

On peut y lire cette note rédigée de la main du grand homme :

Penser à télécharger (pour : charger au loin) chanteuse MP3 (mp3 pour : marcheurs porteurs = 3 )

 

On peut apprécier ici le modernisme prémonitoire du duc qui téléchargeait déjà de la musique en mp3, à une époque ou Lully se contentait de diriger des orchestres à l’instrumentarium instable et à l’interprétation approximative, en se tapant à toute force sur le pied avec une canne !

 

Mais ceci est une autre histoire.

 

Toujours est-il que l’idée du docte duc, donc, dut bientôt faire fureur.

 

La cour étant toujours prompte à imiter le monarque, la noblesse  la plus huppée demanda bientôt à notre duc de lui envoyer ses si charmantes chaises musicales, ou comme disait l’archi-duchesse : ses chanteuses si chères sur ces chaises assises.

 

Cette activité devint fort lucrative et le duc avait presque reconstitué la fortune familiale que son père avait dilapidée dans les tripots et, il faut bien le dire, en compagnies de courtisanes à la vertu incertaine.

 

Mais un incident vint faire obstacle à cette fulgurante réussite.

 

Le duc eu un différent, dont on connaît mal l’origine, avec le Marquis de BARTABAS.

 

Or, il se trouve que Marquis avait fait une découverte importante, à savoir : lorsqu’on enferme un cheval dans un espace circulaire : il tourne. L’église avait bien essayé d’étouffer cette fulgurante avancée dans l’œuf, mais le marquis avait tenu bon. On se souvient de son désormais célèbre « et pourtant, ils tournent »

 

Monsieur, frère du Roy, subjuguée par cette découverte, l’avait fait nommer intendant des bouses et crottins et le Marquis de BARTABAS compta bientôt au nombre de ses favorits.

 

Il lança une cabale contre le duc (exultant : « je veux et j’exige d’exquises excuses » mais le docte duc dit « à duc Boc nul ne dicte, d’ou qu’il dicte et quoi qu’il dicte, duc ne dédit ses dits ni ses édits, donc c’est dit c’est un édit »

Et ce fut dit tant et si bien que notre malheureux Wolfgang Amadeus tomba en disgrâce.

 

Jean Racine, historiographe du Roi rapporte : «  Malgré la haute estime qu’il eut pour Boc de Wurlizeer, le roi céda aux instances de la Reine et fut défavorable au Duc, ne voulant pas ajouter raisons de dépit à celles qu’engendrait son commerce fréquent avec force courtisanes ».

 

Le Duc donc fut condamné, au choix :

-soit au supplice de la sarkozette,

-soit à la déportation dans les terres lointaines des Amériques.

 

Pour la compréhension de l’histoire, je me dois de m’arrêter un instant ici, pour narrer à ceux d’entre vous qui l’ignorerait, ou qui l’aurait oublié, en quoi consistait l’horrible supplice de la sarkosette :

 

Il s’agissait écouter, de force, durant une semaine entière, sans discontinuer, un chantre, favori du Roi : le DUC GINECO.

 

Dans sa grande mansuétude, le Roi commua la peine à 5 jours, puis 3 jours, puis 1 jour, puis 2 heures….

 

Mais rien n’y fit, qu’auriez-vous fait, qu’aurions-nous fait à la place du duc, même pour 2 heures c’était insoutenable, Wolfgang choisi les Amériques.

 

Lesage en 1724, s’inspire de cet épisode de la vie du duc dans sa comédie : « L’américain malgré lui » (acte II, scène IV).Le personnage du Duc s’exprime ainsi :

 

Oh, mon dieu Majesté, votre sire est trop bonne !

Que d’adoucir ainsi, la peine qui m’échoit,

Et, c’est avec regret, quel que soit mon émoi

Que de votre clémence je ne puis faire le choix

Ouïr de ce faquin, ce ladre, ce dément,

Les élucubrations, ne fut-ce qu’un instant,

Est plus haut que ma force, certes je ne le puis

Sans y perdre l’esprit et peut-être la vie.

Plutôt que de subir, ce supplice tragique,

Je préfère, oh mon roi, partir aux Amériques

 

En tous cas l’affaire était pliée.

 

A ce moment on perd quelque peu la trace de notre Duc, pour le retrouver quelques décennies plus tard : il à épousé une émigrante prussienne du doux nom de Gudrun Swartzundblumenkopf von Indermûlen Schwartsvaldkircchen. Il semble qu’ils aient eu une nombreuse progéniture (18 ou19 enfants) mais surtout il à fait fructifier son invention qui commence à avoir un grand succès sur le nouveau continent.

 

Comme vous le savez, les grandes inventions prennent souvent le nom de leur inventeur, il en est ainsi pour :

Jean Sébastien Mouche qui inventa le célèbre Bateau Mouche

Henry Kording qui inventa l’enregistrement Phonographique

Ou le Préfet Poubelle qui inventa la 2cv Citroën

 

L’invention du Duc Wolfgang Amadeus BOC de WURLIZER prit donc le nom de DUC BOC WURLIZER.

 

Mais avec l’altération du au déplorable accent anglo-saxon dont sont affublés les autochtones de ces contrées à la civilisation sommaire, DUC BOC devint : JUKE BOX.

 

Une page glorieuse de l’histoire du monde était écrite : Le célèbre JUKE BOX WURLIZER était né !

 

La descendance de Wolgang Amadeus et de Gudrun allaient en assurer la pérennité.

 

L’arrière petit fils Rudolf fonda THE VURLIZER COMPANY en 1856. A cette date, l’antique devise de la famille : « si non verum bene trovatum est » (si c’est pas vrais, c’est bien trouvé) est remplace par « the more litlle song is better that a great speatch » (ce que l’on peut traduire littéralement par : cause toujours Christophe, mais chante le, ce sera mieux mon Colomb)

 

Le DUC BOC (juke-box) a de plus en plus de succès, il devient un appareil fixe, présent dans la plupart des saloons, avec une ou plusieurs chanteuses à demeure selon le standing de l’établissement.

 

En cette glorieuse époque de la ruée vers l’or et du génocide indien qui fit la gloire d’HOLLIWOOD, les appareils étaient dotés de monnayeurs adaptés pour recevoir, en paiement de la prestation, les pépites que chercheurs d’or, orpailleurs et autres aventuriers, extrayaient à foison.

 

C’est vers 1880, après que Henry KORDING (et non pas Thomas Edison, comme on l’affirme souvent par ignorance), eut inventé l’enregistrement phonographique que les interprètes vivants quittèrent les juke-boxes au profit des rouleaux enregistrés.

 

Ces cylindres, sur lesquels étaient gravée la voix, étaient, également nommés les « ceintures » en raison de leur forme circulaire.

La machine de la compagnie WURLIZER comportait quarante morceaux de musique; ainsi donc naquirent les quarante ceintures, nom qu’ou donna par erreur, beaucoup plus tard, à ces ridicules galettes de vinyle de 17 cm de diamètre affublées d’un trou si démesuré en leur centre qu’il nécessitait une prothèse circulaire (appelée centriste) pour pouvoir écouter les adolescents braillards qui y gravaient par l’intermédiaire de microphones, leurs élucubrations stériles.

 

Je sais certains me diront : quarante ceintures / 45 tours…, au plan phonétique ça semble approximatif, tiré par les cheveux.

A ces septiques, ces mauvais coucheurs, je répondrais : et à la frontière mexicaine. ? Comment parle-t-il, le sergent Garcia ?: quarantecintourre ! Et toc.

 

Et bien, Mesdames et messieurs, monsieur le préfet, monsieur le ministre, monseigneur, mon général, monsieur le directeur, votre émergence,

 

-Retrouvé dans les caves de la maison blanche, ou personne ne sait comment il y est arrivé, (certains rapportent que le président Lincoln appréciait également les accortes divas, mais rien n’est prouvé scientifiquement.)

 

-Restauré grâce à la diligence et au savoir faire des ateliers techniques des arènes de Nanterre, sous la direction compétente et zélée de l’ingénieur Denis…

 

C’est le dernier exemplaire des appareils originaux de la conquête de l’ouest, que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui, en parfait état de fonctionnement.

 

Grâce à la collaboration de la célèbre cantatrice : Madame Rivat d’Aubert et du grand ténor Castex, nous allons pour la première fois en France vous faire une démonstration, dans des conditions historiques, de la FABULEUSE INVENTION DU DUC BOC DE WURLIZER.

 

Je vois, parmi l’assistance publique, des regards septiques, dubitatifs : ces appareils étaient dotés de monnayeurs adaptés pour recevoir, en paiement de la prestation, des pépites, mais ou allons nous trouver des pépites pour faire fonctionner la merveilleuse machine ?

 

Qu’à cela ne tienne, mes assistants ont tout prévu : j’ai la par-devers moi un petit sac de petites d’or extraites, dans les années 1860 d’un affluent du Mississipi, que je me propose de vous céder pour la modique somme de 2€ l’une, 4€ les 2, 6€ les 3.

 

Ces pépites vous permettront, en les introduisant dans l’orifice prévu à cet effet sur le coté gauche de l’appareil, d’écouter en la sélectionnant à l’aide du clavier métallique en fer que vous voyez ici à l’avant de la machine, la chanson de votre choix parmi celles de la liste qui vous est ici présentée.

 

Encore une objection : ou va l’argent ?

En effet nous avons tous étés échaudés par des solliciteurs de tout poil, parfois peu scrupuleux, sans qu’il nous soit possible de contrôler la bonne utilisation des fonds que nous avions généreusement versés.

 

Ici aucun problème, ici tout est transparent : la recette sera remise in extenso à LA FONDATION DES AMIS DU DUC DE BOC que j’ai l’honneur de présider ; donc, pas d’intermédiaire, pas de frais inutiles, pas de commissions, pas d’évaporation, tout, directement, in the pocket.

 

Je reste bien entendu avec vous, et je suis à votre entière disposition, pour vous aider dans les délicates manœuvres que requière l’utilisation de ce véritable juke-box vivant. Il est certes d’une ingéniosité confondante, mais l’authenticité de son mécanisme n’exclue pas, tel le célèbre joueur d’échecs, un certain archaïsme de fonctionnement, qui requiert une manipulation aussi habile que compétente.

 

Et maintenant, Mesdames et Messieurs, Ladies and Gentlemen, Damen und Herren, Signores y signoritas, français, françaises, belges, belges, Croates, Croates….. Place à la musique et surtout, passons la monnaie !

 

 

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